Fréquemment il arrive qu'un couple ait le désir de faire biographie commune. Dans ce livre, intitulé Une Confluence, nous évoquons l'enfance de chacun, les membres de la famille, l'instant de la rencontre, la vie maritale, la venue des enfants, l'univers professionnel, la place des loisirs, et autres anecdotes... Le livre illustre ici l'harmonie d'un couple.

Madeleine et Jacques Dubois m'ont confié leur projet d'écriture et la structure de leur livre a été imaginée sur le modèle d'une vaste conversation. Au cours d'un dialogue écrit, d'après les propos des interlocuteurs, un récit fluide apparaît. 

Lorsqu’ils se rencontrent à l’université en 1964, Madeleine et Jacques côtoient le même cercle d’étudiants, s’émerveillent à la fois de leurs valeurs semblables et de leur altérité. Très vite, ils partent à l’aventure sur des bateaux qu’ils rénovent pendant leur temps libre.

C’est une évidence : ils s’engagent dans la traversée de la vie, ils feront escale dans les domaines marital, conjugal, parental, familial, professionnel, amical, relationnel.

Installés avec leurs deux fils en région parisienne, Madeleine et Jacques s’investissent ensuite dans la rénovation d’une maison de vacances en Auvergne, à La Montlhiade, un lieu qui leur est cher. Dans le même temps, le couple construit progressivement son havre de paix à La Tuilerie...

Madeleine et Jacques Dubois se sont impliqués dans l’élaboration de ce livre, qui leur a été offert par leurs proches au cours de leurs noces d’or. Ils ont veillé aux moindres détails afin de contenter leurs lecteurs.

Une Confluence rassemble une kyrielle d’anecdotes, d’explications, d’événements, en vue d’une transmission intergénérationnelle.

Extrait de leur ouvrage : 

« S’aimer, ce n’est pas se regarder l’un l’autre, c’est regarder ensemble dans la même direction. » Cette célèbre citation d’Antoine de Saint-Exupéry, extraite de son récit autobiographique Terre des hommes, convient parfaitement au couple formé par Madeleine et Jacques depuis les six dernières décennies. L’un et l’autre évoquent leurs souvenirs sans difficulté, chacun avec le temps de parole qui lui est imparti, sans doute l’habile démonstration d’une expérience de couple réussie. Madeleine et Jacques sont deux entités, venues de deux mondes distincts, aux valeurs communes, aux tempéraments complémentaires. L’appréciation de cette dissemblance amène nos deux protagonistes à former cette grande aventure qu’est le couple. Mais c’était il y a combien de temps déjà ?

MADELEINE DUBOIS : Nous nous rencontrons en 1964 à l’université de sciences d’Orsay à Paris XI où j’étudie la physique-chimie. Au cours de l’année scolaire précédente, j’avais fait une première année durant laquelle j’avais découvert la mixité, les cours magistraux en amphithéâtre, les longs travaux pratiques de trois heures, les trajets quotidiens de deux heures, RER compris, le restaurant universitaire que l’on appelait « resto U »... Je fréquente particulièrement les bibliothèques, je vais à celle du soussol pour être plus efficace dans mon travail. Et j’évite de discuter...

JACQUES DUBOIS : Je venais de réussir mon année de terminale scientifique, nommée Mathématiques élémentaires, au prestigieux lycée Saint-Louis à Paris V. À mon grand étonnement ! Durant l’été, en juillet, j’avais encadré un camp scout, ce qui m’avait permis d’apporter l’ensemble du matériel, dont une tente militaire, pour organiser une virée en scooter avec deux copains. Nous avions visité l’Espagne, particulièrement Barcelone, nous avions fait du camping sauvage, lequel était déjà interdit, mais on s’en foutait littéralement ! Et le scooter n’était pas non plus le moyen de transport le plus fiable...

MADELEINE : Pendant mes vacances, j’avais animé également un camp scout en juillet et une colonie dans les Vosges en août, dédiée à des enfants, âgés de 6 à 8 ans. J’avais été jeannette dès l’âge de 8 ans, puis guide à 12 ans, selon la hiérarchie en vigueur dans l’organisation scoute. J’étais enthousiasmée par les activités qui nous réunissaient trois dimanches sur quatre, et au moins trois semaines en camp pendant l’été. Parfois nous partions également pour un séjour d’une dizaine de jours à Pâques. Cela me sortait de la vie familiale. C’était donc avec reconnaissance que j’étais devenue animatrice d’une compagnie de guides dans ma ville. J’avais tellement envie de transmettre ce que j’avais vécu. C’était une microsociété qui offrait à chacun une responsabilité et un parcours vers l’autonomie. Alors que nous participions aux célébrations du culte catholique et que nous évoquions des thèmes de réflexion variés autour de notre quotidien et de notre vie que nous appelions « carrefours », de nombreuses activités nous étaient proposées. Nous apprenions tant de choses : s’orienter avec une carte et une boussole, donner les premiers soins, faire des nœuds spécifiques, choisir un thème de veillée et l’exploiter, allumer et entretenir un feu, cuisiner au feu de bois, apprendre les rudiments de la cuisine. Par la suite, chaque équipe avait à cœur de réinvestir ces savoir-faire dans la création et l’entretien de ses propres installations (table et bancs, vaisselier...). Ces camps étaient agrémentés de jeux de piste qui nous incitaient à marcher, et nous alternions avec des grandes discussions qui nous inspiraient d’autres méditations. De fait le scoutisme est un état d’esprit qui me rapproche tout de suite de Jacques.

JACQUES : Oui. Nous partageons des valeurs identiques qui contribueront à l’épanouissement de notre couple. Quand nous nous rencontrons, je viens de m’inscrire à la fac, mais je ne travaille pas beaucoup dans ces annéeslà. Je m’empresse de créer du lien, j’organise des soirées étudiantes. Je prends le temps de rencontrer la jeunesse de ma génération. Je vis seul dans un petit appartement proche de Paris, au 10, avenue Pierre-Brossolette à Malakoff. Cet endroit avait été un relais de diligence aux portes de Paris dont il reste des traces : un puits dans la cour et des écuries, métamorphosées en habitations.

MADELEINE : J’aimerais bien être seule de temps en temps. L’ambiance chez moi ne me permet pas d’étudier. Mes parents, Thérèse, Marie, Andrée Le Roy (24/06/1914- 18/12/2008) et Jean Lucien Rix (07/09/1907-19/03/1970), ont sept enfants ; je suis la deuxième de la fratrie (...) Mariés en octobre 1943 à Gamaches, mes parents vécurent dès 1944 dans l’appartement que mon père possédait déjà, boulevard Montparnasse à Paris. Quand j’avais deux mois, ils s’installèrent dans un petit pavillon avec jardin à Antony de 1946 à 1950. Puis, au vu des naissances, la famille emménagea dans un pavillon plus spacieux, situé au 29, rue Oger à Bourg-la-Reine, où nous restâmes jusqu’en 1971... Il y a trop de bruit et de choses à faire dans cette maison ! Le samedi, je file à la bibliothèque des étudiants en médecine, où règne un silence absolu, pour me replonger dans les bouquins.

JACQUES : J’ignore à l’époque le quotidien de Madeleine, je ne me rends pas compte de ses responsabilités. Je suis quelque peu immature.

MADELEINE : Justement, Jacques sait me sortir de ce quotidien très sérieux. Je m’évade, c’est l’aventure qui sonne à ma porte alors que je suis une jeune fille qui s’évertue à rester dans un carcan défini, à obéir, à faire ses devoirs, à ne pas se distraire...

JACQUES : Je rappelle au passage que je suis né à la clinique des Fleurs à Rabat et que j’ai vécu en Afrique durant mon enfance en compagnie d’un chimpanzé, Podekol (vous apprécierez le jeu de mots), un camarade de jeu qui se demandait pourquoi je ne montais pas aussi vite et aussi bien que lui aux manguiers... Le père de Jacques, René Dubois, était géomètre ; et dans le cadre de son activité, il partit en Afrique pour y tracer les routes. Il s’était marié trois fois. Sa première femme devait être une danseuse de cabaret. Dans l’un des courriers, adressé à sa mère, René pensait que ce serait sa seule expérience du mariage... Pourtant, il se remaria, mais sa deuxième épouse décéda vers 1940, apparemment des suites de la fièvre jaune. Et Madeleine Devulder, la maman de Jacques, fut sa troisième épouse, de 15 ans sa cadette. René et Madeleine se rencontrèrent à la dernière exposition coloniale en 1937. Comment avaient-ils vécu leur relation alors que le père de Jacques était encore marié ? Jacques n’en sut rien. Cela resta un secret de famille. La vie du père de Jacques demeura teintée de mystères...